Vital

Scholl, j'avais ça en tête, oui. Mais uniquement parce que j'ai un peu suivi l'histoire, et tout le monde n'en est pas au même point. Donc ça ne justifie pas autant de messages énigmatiques. Sauf si c'est une demande d'attention, auquel cas l'objectif est atteint...

Ou pas. Trop de demandes d'attention tuent l'attention. Mais vas y, Onda. On t'attend.

Option 2.

On attend donc le plus tard, mais pas trop tard ^^

Ce chirurgien est visiblement un gros connard, ouais. Qui s'est visiblement foutu de ta gueule, ouais.

Après, tu voudrais pas arrêter de te flageller TOI ?

J'veux dire... Lui, il avait les cartes en main, avec ses connaissances médicales, avec l'état de tes articulations, toussa, de ne pas te promettre des progrès fulgurants.
Il a manifestement choisi de ne pas le faire, très probablement parce que ça lui fout de la thune dans les poches.

Ca me rappelle furieusement ma rogne quand j'ai appris que mon cousin, papa d'une petite fille de 8 ans polyhandicapée profonde, était allé avec sa femme et sa fille, à ses frais parce que non les assurances remboursent pas ca, en Israel consulter un "éminent spécialiste" qui lui avait promis tout plein de progrès magiques pour sa fille.
Dès le début, quand on m'en a parlé, je me suis dit que ça puait sévère la merde, parce que bon, la gosse qui fait crise d'épi sur crise d'épi, qui ne marche pas, qui ne parle pas, j'avais des très gros doutes sur le fait que Docteur Miracle puisse la "déshandicaper".
De fait, ça ne l'a absolument pas déshandicapée, ça a juste délesté le compte en banque de mon cousin (heureusement assez friqué parce que architecte, mais par principe je trouve ça à gerber) d'une somme non négligeable !

Des vendeurs de rêve, y en a. Qui exploitent l'envie légitime des gens de pouvoir avoir une vie aussi normale que possible (ou, dans le cas de mon cousin, que leur enfant puisse avoir une vie aussi normale que possible).

Mais merde, toi tu n'as pas à t'en vouloir.

J'veux dire, sans déconner, il t'a dit que ca allait marcher. Pourquoi tu ne l'aurais pas cru ? Il est médecin, et tu n'avais aucune raison a priori de penser que c'était un connard.

Sincèrement : tu as bien fait de le faire.

C'est mieux d'avoir à rager sur un médecin qui est un connard, que de passer ta vie à te dire "Mais si j'avais essayé, peut être que je pourrais marcher".

Tu as essayé. Ca n'a pas marché. Bon. De quoi tu as à t'en vouloir, au juste ?

Je m'en veux car ce n'est pas comme ci j'avais ignoré tout ça. La patho, ses conséquences, l'état de mes articulations, mes possibilités de progrès objectives etc. Je veux dire, j'ai un suivi SESSAD depuis mes 4 ans, j'ai eu le temps de tourner autour du problème. Mais j'ai fais le choix, délibérément de ne pas écouter la raison, la logique, les autres avis médicaux pour foncer tête baissée là-dedans. D'ailleurs, c'est surtout cela que je me reproche, pas de l'avoir, car sur ce point, je suis pleinement d'accord avec toi, si je n'avais pas essayé, je m'en serais voulu toute ma vie, mais d'y avoir cru aussi profondément alors que je m'étais promis que je garderais la tête froide quoi qu'il arrive.

Justement, quand on partait, il y avait un jeune couple qui attendait derrière la porte, leur petite fille polyhandicapée dans les bras qu'ils regardaient avec un mélange d'amour, de détresse et l'espoir que le grand monsieur en blanc dans le bureau sauve leur bébé légume. Ils m'ont fait peine tous les trois, surtout les parents parce que la petite, je suis pas sûre qu'elle pige quoi que ce soit. Eux ils ne savent pas, leur confiance ne m'a pas mise autant en colère que la mienne car eux ils ne savent pas, pas encore. C'est pour cela que l'intervention fait des miracles sur le polyhandicap : les parents n'ont rien, leur enfant ne fait rien, alors diminué l'effet spastique et permettre au gosse de déplier les doigts, même s'il n'en reste pas moins polyhandicapé, ça leur semble un fichu miracle.

Bref, je me suis comportée comme ces parents désespérée et je trouve cela vraiment bête parce que maintenant je ne suis pas bien, parce que maintenant j'attends : J'ai mal à la hanche. Ouais comme d'hab. Ouais, sauf que j'aurais pu ne plus avoir mal. Je suis crevée. Ouais, comme d'hab. Ouais, sauf que ce mouvement là, il était censé devenir facile. etc.

Je suis en colère parce que j'ai vendu mes espoirs à ce type et qu'il a craché dessus pour environ cinq mille euro. J'aurais dû les garder pour moi.

Barcelone mis à part, je suis triste ce soir.

Parce que les myopathes meurent et que j'oublie toujours que les myopathes meurs. Je le sais dans un coi de ma tête, mais je l'oublie. Je les croises à l'IEM, je leur dis bonjour, parfois j'échange quelques mots avec eux, souvent pas, Je les suis sur Facebook et parfois, souvent pas, je commente leur statut, leur souhaite leur anniversaire ou discute avec eux en MP. Puis un jour ils meurent et je vois les RIP et autres messages de deuil ou condoléances qui défilent sur Facebook. C'est fini M, C, F, K, tant d'autres, morts. Il n'y aura plus de bonjour, plus d'échange de quelques mots, plus de nouveaux statuts Facebook, plus d'anniversaires, plus de MP. Il y a deux jours, c'est O qui est mort on m'a proposé de venir aux obsèques demain, j'ai refusé, parce que je n'apprécie pas tant que ça le "on" qui me l'a proposé, parce que j'ai la sensation de n'avoir rien à y faire, parce que c'est loin et difficile d'accès, parce que je ne sais pas. Je regarde les dates de naissance, pour O c'était Avril 1996, de quelques mois plus jeune que moi. Ce n'est pas juste. Alors je me demande et si la vie était juste ? Et si tout se jouait au mérite ? Et là je me rends compte que dans ces conditions, beaucoup de ceux dont je suis proche seraient morts avant eux. La vie est injuste. Mais je le suis un peu aussi finalement. Bien qu'ils ne m'aient pas attendu pour avoir des amis, peut-être que j'aurais pu leur donner plus d'importance, peut-être que j'aurais pu faire plus de dons au Téléthon, peut-être que je devrais me montrer encore plus digne et méritante.

Les myopathes meurent. Les cancéreux meurent. Les diabétiques meurent. Les médecins meurent. Les hamsters meurent. Tout le monde meurt.
Certaines personnes meurent à 20 ans, d'autre à 80, et ce n'est pas une histoire de justice, de mérite ou de gentillesse. C'est juste la vie. C'est peut être moi qui suis insensible, mais quelque part, je me dis que tu ne devrais pas tant te prendre la tête.

Les myopathes meurent. Mais ce n'est pas pour cette raison que tu dois être plus gentille avec eux, plus attentive, donner plus au Téléthon, ou que sais-je encore. Sois attentive à qui tu veux, non pas parce qu'ils vont a priori mourir plus jeune que les autres personnes que tu connais, non pas parce qu'ils ont une myopathie, non pas parce qu'il faut que tu sois plus méritante, mais juste par envie.
Tu n'as pas envie de leur accorder plus d'attention qu'actuellement ? C'est ok, je ne vois pas pourquoi tu devrais. Garde à l'esprit qu'une maladie ne doit pas changer ton regard sur autrui. Une personne avec une maladie, une myopathie, que sais-je, c'est une personne avant tout. Elle peut être conne, stupide, avoir des valeurs différentes des tiennes, un caractère incompatible avec le tien, etc. Tu n'es pas tenue de l'apprécier ou de lui accorder de l'attention si tu ne l'aimes pas, juste parce qu'elle traine une pathologie.

Enfin, je dévie un peu des faits de base. Je comprends ta tristesse, hein, qu'une personne que tu connaisses meure c'est forcément pas cool à vivre. Calin

Ca me fait juste chier parce que plein de fois je me suis dis "plus tard" alors que ils n'avaient pas plein de plus tard. Dans le cas de O, c'est quelqu'un avec qui j'aurais clairement pu m'entendre, mais je me suis dis plus tard pensant que ça n'arriverait pas.