Une critique de la médecine traditionnelle

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VomiCornFlakes
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Une critique de la médecine traditionnelle

Message par VomiCornFlakes »

Toutes les thèses de Foucault sont très intéressantes en fait.

Extrait du mémoire Michel Foucault ,Psychiatrie et medecine par David Labreure
http://www.memoireonline.com/06/07/479/ ... cine0.html
IV : UNE CRITIQUE DE LA MEDECINE TRADITIONELLE :

Par le constat de cet ensemble de phénomènes, Foucault a notamment voulu se démarquer des mouvements anti-médecine, notamment celui d'Ivan Illich (voir pour cela le titre de l'une des deux conférences de Rio : Une crise de la médecine ou de l'anti-médecine).Pour Illich, la médecine actuelle crée des nuisances au lieu de soigner : les indicateurs de santé sont faux et privilégient l'individu malade au lieu de mettre en lumière l'environnement pathogène autour de cet individu. Selon Foucault, il n'y a selon lui pas de crise actuelle de la médecine mais l'aboutissement d'un fonctionnement historique débuté dés le XVIII ème siècle. On ne doit ni rejeter en bloc la médecine et ses institutions (comme le fait Illich), ni les accepter non plus : Celles-ci sont tellement ancrées dans la société qu'il est impossible d'envisager autre chose que leurs modifications, leurs évolutions. Cette médicalisation progressive n'est pas dangereuse en elle-même, Foucault n'ayant jamais considéré comme nuisible les progrès de la médecine et l'amélioration des soins... En revanche,on peut accréditer la thèse de Jean Claude Monod selon laquelle Foucault trouverait anormal que des pays sous-médicalisés ou sujets à de graves maladies guérissables pourtant dans notre monde occidental,ne profiteraient pas de ce « boum » de la médecine. Il nous faut toutefois admettre que la médecine appartient à un ensemble de systèmes, historiques, économiques ou encore un système de pouvoir qui s'il n'est pas mieux maîtrisé à l'avenir peuvent constituer un réel danger. Les grandes difficultés rencontrées actuellement dans certaines branches de la thérapeutique (clonage, bio-éthique...) peuvent en tout cas donner crédit aux inquiétudes de Foucault. Dans « Les grandes fonctions de la médecine dans notre société », cité dans Dits et écrits et datant de 1972, Foucault réagit violemment sur le reproche fait à des élèves d'avoir flirté dans un lycée de Corbeil et, surtout, sur un rapport du docteur J.Carpentier, radié de l'ordre des médecins à cause d'un tract intitulé « Apprenons à faire l'amour ».Foucault s'interroge sur les raisons pour lesquelles le corps médical a pu se sentir attaqué. Il nous donne de précieux indices sur sa vision du corps médical, en dépit du contexte houleux de cette affaire qui a peut être exacerbé son sens critique. Foucault se démarque de ces « quatre ou cinq grandes fonctions de la médecine traditionnelle » [87(*)] et déplore les faits suivants :

- Que la médecine soit une pratique essentiellement individuelle, un dialogue médecin-malade.

- Que la médecine soit devenue un facteur de discrimination sociale et morale : il n'y a pas une mais plusieurs sortes de médecines adaptées aux différentes classes de la société.

- Que la médecine (essentiellement la médecine psychiatrique) ait pour fonction principale de remplacer la religion en tant que gardienne d'un certain ordre moral.

- Que la médecine juge de la normalité ou de l'anormalité de tel ou tel acte : La médecine outrepasse sa vocation originaire en se faisant aussi une instance judiciaire.

Outre ce constat d'une médecine en crise, Foucault s'est intéressé à la manière dont la médecine s'organisait à l'échelle de la société, comment elle s' « épanouissait » à l'hôpital et comment celui ci était le véritable instrument de la médecine sociale.

* 87 Michel Foucault, « Les grandes fonctions de la médecine dans notre société » in Dits et Ecrits, Vol I et II, Quatro Gallimard, Paris, pp.1249 et 1250.

http://www.memoireonline.com/06/07/479/ ... ine13.html
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VomiCornFlakes
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Re: Une critique de la médecine traditionnelle

Message par VomiCornFlakes »

Et ce texte écrit en réaction à un évènement de l'époque, critiquant l'ordre médique que souhaite faire régner l'ordre des médecins
« Les grandes fonctions de la médecine dans notre société »

Psychiatrie aujourd'hui, n° 10 : La Faute du docteur Carpentier, septembre 1972, pp. 15-16.

(Intervention de M. Foucault àla conférence de presse du Dr J. Carpentier, 29 juin 1972.)

Sollicité d'intervenir par des lycéens de Corbeil sanctionnés pour flirt au lycée, le DrCarpentier rédige et distribue, en mai 1971, un tract intitulé « Apprenons à faire l’amour ». Les parents d'élèves portent plainte; un an après, le conseil de l'Ordre suspend pour douze mois le Dr Carpentier.

La question est très simple, elle est celle-ci: qu'est-ce qu'on peut faire dans cette affaire? Parce que je crois que tout de même cette affaire, bien sûr, c'est la vôtre, mais en un sens aussi elle nous concerne.

Je lisais tout à l'heure les considérants de votre condamnation et je vois que l'ordre des médecins s'est senti attaqué par ce que vous avez fait, dans ce qui constitue pratiquement les grandes fonctions de la médecine dans notre société.

Il se sent attaqué:

1° Parce que votre pratique n'est pas entièrement individualiste et secrète. Or la médecine fonctionne dans notre société comme pratique individualiste de tête à tête, de dialogue «médecin-malade», comme ils disent, et dans le secret.

2° Il vous reproche de n'avoir pas tenu compte des différences d'âge et de milieu, et c'est,en effet, l'une des grandes fonctions de la médecine de notre société de maintenir, de reconduire, d'appuyer toutes les différences, toutes les ségrégations, toutes les exclusions qu'il peut y avoir en fait d'âge, en fait de milieu: la médecine ouvrière n'est pas la médecine bourgeoise, la médecine des enfants ne doit pas être la médecine des adultes, etc., et là ils se sentent attaqués par ce que vous avez fait.

3° Ils vous reprochent d'avoir incité des enfants à des pratiques qui disent-ils, «normales ou non, ne peuvent qu'entraîner des troubles psychiques ». Or, depuis le XVIIIe siècle exactement, l'une des grandes fonctions de la médecine, de la médecine psychique, psychiatrique, psychopathologique, neurologique, a été précisément de prendre le relais de la religion et de reconvertir le péché en maladie, de montrer que ce qui était, ce qui est péché bien sûr ne sera peut-être pas puni là-bas, mais sera certainement puni ici. C'est l'une des grandes fonctions de la médecine du XVIIIe siècle.

4° Je vois, dans ce texte, que l'ordre des médecins vous reproche d'avoir fait un scandale, c'est-à-dire ce qu'ils appellent une publicité, enfin ce qui est public qu'on appelle scandale, et d'avoir fait rejaillir ce scandale sur la profession médicale, c'est-à-dire que la profession médicale, la médecine, la pratique médicale a essentiellement pour fonction de maintenir tous les grands tabous de la morale, de la morale bourgeoise, de la morale de notre société et, par conséquent, quand la loi morale, les habitudes morales, les tabous moraux de notre société sont attaqués, du coup il est du rôle fondamental de la médecine de se porter en première ligne et de lancer la contre-offensive : c'est la médecine comme gardienne de la moralité, de la moralité tout court.

5° Enfin, moi, je vois toujours dans ce même paragraphe que ces pratiques qui étaient considérées un peu plus haut comme «normales ou non» sont brusquement, à la fin, définies comme «débauche», c'est-à-dire que la médecine a en même temps une fonction judiciaire. C'est la médecine qui non seulement définit ce qui est normal et pas normal, mais finalement ce qui est licite ou pas licite, criminel ou pas criminel, ce qui est débauche ou pratique maligne. L'utilisation des expertises psychiatriques dans la justice est encore, là aussi, une de ces fonctions; donc finalement, moi, je crois que c'est en effet toute la médecine dans son fonctionnement depuis le XVIIIe ou le XIXe siècle que vous avez attaquée, et elle se défend effectivement là où elle est attaquée, c'est-à-dire partout. Or je crois que le fonctionnement de la médecine ne satisfait pas une certaine partie des médecins actuellement et, d'autre part, ce fonctionnement traditionnel de la médecine ne satisfait pas non plus les gens que nous sommes, c'est-à-dire purement et simplement des clients. Nous ne sommes rien d'autre que des clients de la médecine, donc si nous sommes d'accord avec vous pour ne pas accepter ces quatre ou cinq grandes fonctions de la médecine traditionnelle, alors qu'est-ce que nous pouvons faire, médecin ou pas, pour l'attaquer avec vous ou sans vous et pour empêcher l'ordre des médecins de mener la contre-offensive qu'il mène, c'est-à-dire vouloir reconduire les fonctions traditionnelles de la médecine ?...
manu
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Re: Une critique de la médecine traditionnelle

Message par manu »

de manière générale, ce travail de sape s'applique partout, te libérer de *ceci* pour te raccrocher à *celà*
créer des problèmes afin d'y apporter une solution, sinon les 'clients' ne seraient pas baptisés 'patients', l'origine des Thérapeuthes n'est pas tout à fait ce qu'ils sont devenus aujourd'hui
'Docteur' est une classe sacerdotale d'une religion materialiste 'non révélée', dès qu'il y'a création d'une terminologie il y'a re-structuration de concepts abstraits venant contaminer le réel (enfin l'enorme consensus auquel les gens*peuvent* s'identifier, y'en à pour tout le monde)
la 'norme' est fixée comme les poteaux d'enclos à moutons qui pensent qu'au pire il se font tondre... il y'a ici un enorme hold-up, personne ne pense sortir de là vivant et tout le monde s'aligne en attendant la 'fin' du film, un mouton ne peut être acteur à moins qu'il joue le rôle du mouton, pourtant personne n'est revenu d'en dehors de l'enclos (et pour cause) si ç'était le cas se saurait... bah les cas sont nombreux mais ils doivent être re-classés en marge...promptement, là d'autres enclos plus etroits encore jusqu'au plus petit dénominateur commun la 'celulle' qui ne doit pas contaminer l'organisme
monde carceral, on en connait le Prince, fallait le refouler jusqu'a nier l'evidence... nous sommes du bétail et la vue n'est pas plaisante
Les gens payent pour avoir peur (ou d'autres sensations qui les fait se sentir 'vivre'), monnayent leur existence comme dans un parc d'attraction, il y'a des fraudeurs et des pick-pocket. De la peur nait la destruction, c'est l'arme la plus puissante, la peur soulève des montagnes et rase des pays comme une pandemie
La sexualité est sacrée, le don de vie, en faire autre chose comporte certains risques, la differencier de l'amour aussi
une des expressions la plus haute de l'homme etiquetée et mise en rayon, sur place ou a emporter... "je veux consommer, consommer", zblam une addiction comme une autre à, et avec qui traiter
Les temples sont profanés 'de fait', même les 'farouchement athés' le sentent mais comment 'gérer le big-bang individuel sans 'cause première'? et sans douleur s'il vous plait... le détachement (mais pas sous sa forme bouddhique, hérésie) sous sa forme nihiliste, le grand écart, la pirouette et on pousse les débris sous le tapis faute de mieux, le très dangereux ennemi du bien (c'est dans le style 'exception qui confirme la règle')....l'amour bordel, rationaliser l'amour c'est déplacer le coeur dans la tête et perdre son centre de gravité... sous pretexte de légereté, de liberté pardon. L'amour chasse la peur comme l'inverse, mais en créant la peur de la peur l'histoire est entendue, c'est le grand huit a disneyland, même si tu veux pas ^^

"Plus tard je serais docteur"... ou flic démarché par les industries pharmaceutiques pour savoir quoi prescrire si je veux emmener bobonne aux Seychelles. Et ce trou de la sécu (hackers foncez!).... é-norme comme dirait Lucchini
Franchement avec les produits disponibles, comment on peut se trouver dans une situation on l'on se drogue sans aucun plaisir, et ou au mieux on 'stagne'? Suivez l'argent... d'une ca occupe, de 2 vous allez rire, peut être pas sur le coup mais c'est comme une caméra cachée (et là je rigole, parce que c'est une bonne image de la conscience... la capacité de faire un travelling arrière sur les émotions et psychodrames qui nous traversent l'esprit, et tentent de nous harponner)
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DizzyDance
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Re: Une critique de la médecine traditionnelle

Message par DizzyDance »

Ok, les banques sont des dealers d'accoutumance à l'argent.
OK, on est dépossédé de l'esprit et du corps par plusieurs castes (les médecins, les journalistes, les publicitaires)

MAIS...

Les médecins m'ont sauvé la vie par leur dévouement. Démarchés par les pharmas ou pas, ils ont fait plus que leur boulot.
Les psys m'ont empêché de vriller complètement. Démarchés par les pharmas ou pas.

Et les psys, au lieu de vouloir me réinsérer à tout prix dans une société dont je connais les codes qui me rendent (maintenant? toujours?) malade, disent que ma souffrance est légitime, trouvent des stratégies parallèles pour l'alléger, écoutent ce que j'ai à dire et partagent mes coups de gueule. Cette manière d'être (pathologie mise à part) est toute aussi viable, voire plus, que celle communément admise. Le questionnement, l'affirmation de soi, l'objectivité (avec une certaine part de cynisme), les paradoxes sont rendus énonçables et donc acceptables comme autant de briques qui me construisent, au delà de mes émotions primaires (amour, colère, désespoir) qui, à terme, m'auraient détruits car non contrebalancées en amont par la quête de leurs origines, et en aval par une assimilation et sublimation des affects qu'elles engendrent en moi.

Tous les médecins ne sont pas des rouages du système, et tous les patients ne sont pas des crétins béats attendant leur mort dans une quête du mieux-être. La vision de Foucault n'appartient pas au passé, toutefois, surtout à l'aube de la médecine à deux vitesses généralisée, des restrictions gouvernementales dans les politiques de santé, de l'avidité des pharmas et de la protection de toute la caste des médecins aux quelques uns dont les agissements contraires au bien du patient sont mis à jour.

Le cas des amalgames dentaires au mercure en France en est malheureusement qu'un exemple parmi trop d'autres.
Le combat, c'est aussi ça, poser des gestes au quotidien pour non seulement reculer l'échéance, mais, à travers ce genre de petites victoires, vivre.
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Caramel2
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Re: Une critique de la médecine traditionnelle

Message par Caramel2 »

Comme déjà répondu sur un autre topic : les généralités, c'est le mal. C'est le mal quand c'est un médecin qui se pose en sauveur de la morale pour définir que le comportement du patient est "Pathologique parce que contraire à la morale établie", mais c'est aussi le mal quand un mec sur un forum poste ce genre de trucs.

"La médecine", "Les médecins", "les psychiatres", tout ca... C'est pas un bloc uniformisé.

Reprocher à la médecine (et aux psychiatres) une forme d'abus de pouvoir, de "mise dans des cases", c'est un peu dénué de sens quand on face on fait exactement pareil vis à vis d'eux...

Il y a autant de manière de voir la médecine qu'il y a de médecin, il y a autant de manière de voir la psychiatrie qu'il y a de psychiatres... Et jeter tout en bloc, sans prendre le temps de voir les individus, les valeurs et les manières de voir propres à chacun, c'est juste à mon sens de la merde en barre.
God is busy, help yourself !
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